Axe 1
Relations structure-morphologie-propriétés à l’échelle de l’élément structurant
Contributeurs : IFPEN / IPCMS / SOLEIL / LCMCP
Ce premier axe vise à bâtir une compréhension des caractéristiques chimiques, structurales et morphologiques qui justifient l’apparition et la disparition de propriétés de surface (catalytiques) et de volume (insertion/desinsertion) des matériaux visés, à l’échelle de ce qu’on appellera l’élément structurant.
Cet élément structurant peut être défini comme le plus petit ensemble morphologique représentatif de
1 - la composition chimique,
2 - la structure,
3 - l’interface avec le milieu ambiant du matériau.
L’élément structurant doit donc vérifier la notion de volume élémentaire représentatif des propriétés structurales, chimiques et morphologiques du matériau, pertinente pour la compréhension d’une ou plusieurs de ces propriétés.
Pour un matériau monophasé, ce grain peut être poly ou monocristallin et caractérisé par une microstructure mutliéchelle. Pour un matériau polyphasé, ce grain peut être constitué d’un ensemble de phases mono ou polycristallines (nanoparticules de différentes natures chimiques sur un support mixte par exemple), et ainsi engendrer une complexité potentiellement élevée de microstructure. Ces notions d’éléments structurants sont mouvantes lorsqu’on les envisage dans un espace thermodynamique, où les transformations de phases peuvent engendrer de fortes évolutions des caractéristiques structurales, chimiques et morphologiques du système.
Cette notion d’élément structurant vise à restreindre l’objet d’étude à sa plus faible dimensionnalité, et de pouvoir, in fine, en faire un jumeau numérique qui pourra faire l’objet d’un changement d’échelle vers une microstructure de dimension supérieure. Il est donc nécessaire dans cette approche de contraindre les notions de structure cristalline, de composition chimique et de morphologie des différentes phases rencontrées, et des configurations spatiales régissant les interactions entre ces différentes phases. Cette ambition requiert d’employer des techniques d’analyse locales et résolues spatialement, et de les confronter aux propriétés du bulk, elles-mêmes contraintes par des techniques non résolues spatialement, mais souvent plus précises et représentatives. Cette confrontation constitue un premier enjeu de cet axe, nécessitant un travail pluridisciplinaire à la pointe de différentes techniques de caractérisation, complété d’une formalisation synthétique par des modèles mathématiques statistiques et morphologiques.
Concrètement, pour les matériaux envisagés, on précisera deux approches.
Premièrement sur les zéolites, l’approche analytique entreprise dans le LCR CARMEN sera pour l’essentiel reconduite. Ainsi, la morphologie des zéolites sera caractérisée par microscopie électronique à balayage et en transmission (TEM, STEM, diffraction électronique), avec pour les plus gros cristaux étudiés, l’emploi de la tomographie électronique permettant d’élucider la morphologie de mésopores intra cristallins. Des analyses DRX et SAXS permettront de rationaliser les observations MET (taille d’objets, domaines de cohérence, morphologie cristalline) et de construire un modèle statistique de la morphologie cristalline et de la topologie micro-mesoporeuse. Les analyses texturales par physisorption N2, Ar et porométrie mercure permettront d’ajuster et de valider le modèle morphologique établi. Les propriétés de surface des zéolites seront décrites par RMN du proton multiquanta et héteronucléaire, ainsi que par FTIR.
En ce qui concerne les hydroxydes polymétalliques et oxydes dérivés, l’approche expérimentale au travers cet axe nécessitera un travail plus exploratoire. Dans les grandes lignes, ce travail sera une extension de celui entrepris pour l’étude de la transformation boehmite-alumine dans le LCR CARMEN, intrinsèquement plus simple du fait de sa faible entropie. En effet, dans le cadre des systèmes de moyenne entropie visés dans CARMEN 2, la diversité des configurations de phase attendue du fait de la complexité chimique et de l’étendue des conditions environnementales investiguées requerra un effort expérimental considérable. Afin de pouvoir convenablement contraindre les relations structure-propriétés, les informations détaillées de structure seront recherchées, notamment concernant les répartitions cationiques dans les différents sites structuraux (octa, penta, tétraédriques) des hydroxydes et des oxydes, la quantité et la nature des lacunes, les défauts d’empilement. Ces informations seront collectées grâce à l’affinement de structure à partir de DRX fortement résolue, de RMN du solide, de XAS (XANES et EXAFS) et de PDF (Pair Distribution Function). Concernant la description morphologique, les approches combinées MET-MEB/DRX/SAXS décrite pour les zéolites sera également déployée ici. La microscopie analytique sera largement exploitée également, notamment pour définir la chimie élémentaire de chaque phase (EDS-EELS), ainsi que l’état redox des métaux de transition engagés (EELS). La diffraction électronique permettra également localement de lever des incertitudes sur la présence de phases minoritaires invisibles en DRX, et de préciser leur structure. La description des propriétés de surface sera menée par l’emploi de la RMN du proton et de spectroscopie FTIR.
Ainsi, un premier travail d’acquisition de données sur des échantillons ex-situ par ces différentes techniques dans la phase de consolidation des méthodes de synthèse et de traitement thermique des matériaux permettra de formaliser une méthodologie multitechnique collective. Dans une deuxième phase, des expérimentations in-situ seront conduites sur les techniques qui le permettent, afin de contraindre la dynamique structurale, morphologique et chimique de ces systèmes hydroxydes-oxydes polymétalliques, notamment au travers des transformations thermiques qui seront réalisées sur des instrumentations compatibles avec un suivi in-situ au synchrotron (XAS, SAXS/WAXS, PDF).
La synthèse de ces résultats doit permettre de rendre compte de l’élément structurant dans ses dimensions structurales, chimiques et morphologiques, premièrement dans une représentation statique, puis dans une représentation dynamique, en lien avec les transformations de phase induites thermiquement et par les conditions redox. Ces représentations, au même titre que pour les matériaux zéolitiques, doivent rendre compte des informations morphologiques tridimensionnelles ainsi que des descripteurs de l’état de phase et de la chimie de surface récoltés expérimentalement.